Alors que le soleil vient tout juste de se coucher sur le championnat 2010, l’heure est déjà aux premiers bilans. Cette année aura été passionnante d’un bout à l’autre, faite de hauts et de bas, à l’image de la saison de Sebastian Vettel qui est devenu, à 23 ans et 134 jours, le plus jeune champion de l’histoire de la F1.
La saison du nouveau champion n’aura pas été de tout repos, entre les erreurs de jeunesse, comme en Turquie ou encore à Spa-Francorchamps, et les soucis mécaniques comme à Barheïn pour l’ouverture de la saison ou en Corée où son moteur rend l’âme alors qu'il mène la course de la tête et des épaules, le jeune homme n’aura pas été épargné. Mais Vettel n’a jamais douté, jamais renoncé, tout comme Lewis Hamilton qui malgré deux abandons successifs alors qu’il menait le championnat, n’a jamais rien lâché, jusqu’au bout il a tout donné. Mais l’homme fort de cette fin de campagne, c’est le pilote Red Bull. Trois poles et trois victoires (qui auraient pu être quatre) en quatre courses, des statistiques…de champion du monde.
Mais si au terme des 19 Grands Prix, il n’y a qu’un seul vainqueur, il y a 23 vaincus. Parmi ceux-ci, Fernando Alonso. Il était pourtant le seul à avoir toutes les cartes en mains pour décrocher une troisième couronne. Mais une mauvaise stratégie de Ferrari, encore une diront certains, l’aura relégué au beau milieu du peloton. Coincé derrière un Vitaly Petrov qui doit encore sauver sa place, sur un circuit dessiné par Herman Tilke qui ne favorise pas les dépassements, les dés étaient quasiment jetés. Les fans du Taureau des Asturie pesteront sans doute encore longtemps sur Petrov, estimant qu’il a bouchonné le pilote Ferrari, mais le Russe faisait sa course et n’avait par conséquent aucune raison de laisser passer Alonso.
La déception est forcément immense au sein de la Scuderia comme en Italie ou un ministre du gouvernement Berlusconi demandait déjà la démission de Montezemolo dimanche soir. Pourtant à bien y regarder, l’Espagnol peut être satisfait de sa saison et du travail accompli pour sa première année avec l’écurie de Maranello. La F10 n’était certainement pas la monoplace la plus véloce du plateau, mais il est tout de même parvenu à rester en lice pour le titre jusqu’à la dernière épreuve de la saison. Le double champion du monde visait le week-end parfait à Abu Dhabi pour être sacré, il avait raison, sauf que c’est Sebastian Vettel qui a réalisé un sans faute sur l’île de Yas Marina. Seul véritable bémol dans la saison de l’Espagnol, la victoire acquise en Allemagne suite à une consigne d’équipe à peine voilée. S’il serait hypocrite de penser que ce genre de comportement n’existe plus en F1 depuis l’Autriche 2002, il est dommage de voir cela si tôt dans une saison qui a montré que rien n’était jamais joué avant le drapeau à damiers.
Le constat est le même du côté de Mark Webber. Mais qui aurait imaginé que le grand Australien aurait tenu la dragée haute au petit prodige de chez Red Bull tout au long de la saison ? En 2009 déjà, ils étaient nombreux à penser que Vettel ne ferait qu’une bouchée du sympathique Australien, à l’image d’un Jenson Button que d’aucun imaginait déjà largué face à Lewis Hamilton. Si la saison dernière Webber a été le premier des prétendants au titre mondial à lâcher prise, il aura tenu, presque, jusqu’au bout cette saison. Alors, oui, les mauvaises langues diront qu’il n’a peut-être pas toujours été soutenu comme il le méritait au sein de cette écurie Red Bull et elles n’auront probablement pas totalement tord, mais son mérite n’en est que plus grand. Et détail amusant, si Vettel s’était effacé devant son équipier au Brésil, au vu du résultat de dimanche, c’est Fernando Alonso qui arborerait fièrement le numéro 1 en 2011. Comme quoi cette volonté de Red Bull de ne pas donner de consignes d’équipe aura été payante au bout du compte. Est-ce cela qui a perturbé Ferrari à Abu Dhabi ? Adrian Newey, génial concepteur des RB6 n’est pas loin de le penser. En étant contrainte de courir deux lièvres à la fois, la Scuderia s’est prise les pieds dans le tapis, tout bénéfice pour Red Bull qui n’était alors qu’en position d’outsider.
Le numéro 1, Jenson Button va devoir le céder la saison prochaine. Le champion du monde 2009 n’a pourtant pas démérité cette année. S’il a été à la hauteur de la tache, arriver chez McLaren avec Lewis Hamilton comme équipier n’est pas une sinécure, demandez à Alonso. Il a peut-être manqué un peu de mordant à certaines occasions. Il n’empêche qu’il a prouvé, par ses deux victoires, en début de campagne, qu’il savait jouer avec les éléments et se sortir de situations délicates en prenant les bonnes décisions au bon moment.
2010 c’était aussi le retour, très médiatisé, de Michael Schumacher au sein de l’écurie Mercedes GP. Véritable attraction des essais privés d’inter-saison, le soufflé sera vite retombé devant les performances médiocres du septuple champion du monde. Régulièrement devancé par Nico Rosberg, Schumacher n’a semblé que l’ombre de lui-même. Retour manqué ? Peut-être l’attente était-elle trop importante après trois ans loin de la F1. Si le Baron Rouge a perdu ce petit plus qui fait la marque des grands champions, il n’a pas manqué de se rappeler au bon souvenir de certains par le biais de manœuvres litigieuses dont il a le secret, comme en Hongrie ou son tassement sur Rubens Barrichello en pleine ligne droite aurait pu connaître une issue dramatique. Quoiqu’il en soit la fin de saison de l’Allemand laisse entrevoir un regain de forme, le pilote Mercedes se rapprochant de plus en plus de Rosberg. En 2011, il n’aura plus le choix, il devra convaincre ou raccrocher, définitivement cette fois, son casque.
Autre pilote à avoir fait son retour sur les grilles de départ, Felipe Massa. Le Brésilien avait en effet manqué la fin du championnat 2009 suite à son accident lors du Grand Prix de Hongrie. A l’occasion de la première manche à Barheïn, Massa a semblé rassurer tout ceux qui se demandaient s’il serait au même niveau qu’avant son accident, en signant une belle deuxième place derrière Fernando Alonso. La suite de la saison sera bien moins glorieuse pour le sympathique Brésilien. En délicatesse avec ses pneus, il n’est jamais parvenu à tirer le maximum de sa Ferrari. Avec zéro victoire contre cinq à son équipier, le bilan est loin d’être flatteur. Mais plus que son grave accident, le Grand Prix d’Allemagne n’a-t-il pas sérieusement plombé le moral de Massa ? En lui demandant de s’effacer au profit d’Alonso, la Scuderia en a clairement fait le numéro 2 de l’équipe. Gageons que tout ceci ne sera plus qu’un mauvais souvenir l’an prochain et que Felipe Massa viendra se joindre à la lutte pour le titre mondial en 2011.
2011 justement, c’est déjà demain. Les équipes resteront sur le circuit de Yas Marina toute cette semaine pour effectuer quatre journées d’essais. Mardi et mercredi seront consacrés aux « rookie days », l’occasion pour certains d’entre eux de faire leurs preuves, à l’image de Jérôme d’Ambrosio, avant une éventuelle titularisation la saison prochaine.
Et puis, vendredi et samedi, les équipes découvriront les nouveaux pneumatiques Pirelli qui remplaceront les gommes de chez Bridgestone. Ensuite le F1 Circus prendra un peu de repos, bien mérité, avant de revenir, on l’espère, en pleine forme au mois de janvier pour la présentation et les premiers tours de roues des nouvelles monoplaces. D’ici là les fans vont devoir ronger leur frein en espérant que 2011 offrira une lutte aussi indécise que celle qui vient de se clôturer sur le sacre de Sebastian Vettel. Certains espéreront simplement une issue différente…